• Chapitre III - Ancenisium

    Après avoir pansé ma plaie, je repris mon chemin. Bien que ne chassant plus, un peu de repos m’eut permis de me renforcer. Décidée, cette fois, à ne plus rencontrer d'homme, je pris garde à m'éloigner des routes, et même des sentiers. Ceci ne pu durer, malheureusement, qu'un temps. J'arrivais en ces contrées où s'effacent les embruns marins, remplacés par l'odeur chaude de la terre. Mon étoile me semblais plus vive... Plus brillante. À plusieurs reprises, je crus voir l’œil de mon dragon scintiller, comme si le collier me transmettait... Sa joie. J'étais sur la bonne route.

    Je débarquai finalement dans la ville d'Ancenisium, ville immense comparée à ce que j’eus l'habitude de côtoyer. Les gardes semblaient moins agressifs, comme rassurés par la présence du château, immense, majestueux, et... Dérangeant. Les pierres reflétaient les rayons du soleil pour créer de l'ombre aux alentours, voilà quelle fut mon impression en voyant la masse de pierre, imposante et froide, qui se dressait devant moi. On m'apostropha à plusieurs reprises, sans pour autant me déranger. Les habitants semblaient préoccupés par autre chose... Je chercha donc quelque information. C'est à une taverne que je vis un groupe de gardes, discutant bruyamment. Ils parlaient d'une fête païenne, ce qui attira mon attention, en plein compté Chrétien. Ladite fête devait se dérouler dans deux jours, et ils l'appelaient "fête de Samhain". Samhain... Pour moi, c'était un simple rituel que l'on effectuais lorsque les jours devenaient sombres et que le froid mordant de l'hiver approchait... Une sorte de passage d'une saison à une autre, que les gardes nous interdisaient, par ailleurs. Alors pourquoi en parler dans cette grande ville ? La gente y était réellement plus ouverte aux cultures diverses qui formaient notre peuple Breton ? Je m'approchai d'eux, de sorte à mieux entendre leurs paroles. Déception ! Je n'y trouvai que mépris et insultes envers un groupe de personnes qu'ils appelaient "Païens". Ils parlaient de sorcières, d'une femme aux yeux violets, d'un barde plus que centenaire... Ma curiosité fut piquée... Si mon étoile m'avait guidé jusqu'ici, je devais les rencontrer ! Ma main se referma sur mon collier, chaud contre ma paume glacée. Mon souffle se calma peu à peu, et je senti les regards des gardes braqués sur moi. Je fis donc quelques pas pour m'en aller. Sur le pas de la porte de la taverne, j'entendis un des gardes lancer un "Eh, toi !" et accéléra, jetant un œil effaré vers ledit garde. Il bougonna un "Non, rien." et je pu disparaitre dans la nuit.

    L'attente fut terrible, et au fur et à mesure que le jour de la fête de Samhain approchait, je me faisait de plus en plus fébrile, oubliant jusqu'à la faim et au froid qui me tenaillaient. Qui étaient ces gens qui connaissaient les rites de ma grand-mère ? Pour quelle raison mon étoile m'avait-elle guidée jusqu'à eux ? Ma hâte de les voir me rendait nerveuse.

    Ce matin là, il faisait très froid. Pourtant, enveloppée dans ma cape, j'avais dormi comme un enfant. Mon collier diffusait une telle chaleur qu'il me semblait qu'il allait me brûler. Je me levais, quoiqu'un peu difficilement, et m'étirais, cherchant vainement à réduire mes courbatures. Déambulant dans les rues, cherchant le lieu de la fête, détail que j'avais stupidement oublié de chercher, je vis des enfants danser. Ils terminaient un cercle Circassien, et entamaient un rond de St Vincent. Un peu excitée, je me joignit à la danse, histoire de calmer un peu mes nerfs. Les mouvements réguliers de la danse, la coordination des pas et du mouvement de balancier des bras réussi à me calmer. Je les remercia et repris ma route. Un attroupement attira mon attention : vers le pont qui menait hors de la ville, un groupe de garde et plusieurs gens de haut rang étaient rassemblés, et semblaient tendus, pour la plupart. Un jeune, peut-être plus jeune que moi, aux cheveux blonds comme les blés, semblait être au commandement de la garde. Cela me fit penser au compte de Naoned, que l'on racontait être si jeune et pâle, candide, innocent. Mais il n'avait rien à faire ici, à moins que...

    Je me décidai à m'approcher, l'air de rien. Personne ne prêta attention à moi, et je fit semblant d'avoir à faire de l'autre coté du pont. Tout portait à croire que la fête se déroulait hors de la ville. Mon sentiment se trouva vite confirmé par les musiques et les voix que j'entendis en avançant. Ne pouvant me décider à approcher ces inconnus, qui, tatoués, m'intimidaient énormément, je me résolus à écouter leurs musiques, à l'abri des regards. Assise sur les bords de Liger, ce fleuve dont on m'avait tant parlé, je restai ainsi un long moment. Sans doute une bonne partie de la journée. Je me résolu finalement à aller à la rencontre de ces gens, la peur m'ayant soudain assailli : et s'ils étaient ici uniquement pour la fête ? Et s'ils partaient ?

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